jeudi, octobre 05, 2006

Scene 5 - Harry Potter et les Photos Volées

Le cabaret des Trois Anes était un haut-lieu de la magie, l'un des derniers endroits de la capitale où chaque soir avaient lieu des concours de prestidigitation. Sur scène se succédaient des vedettes confirmées et de jeunes premiers venus à la conquête de Paris ; parmi eux, Salim, qui bénéficiait d'un succès grandissant depuis quelques années, était en train d'effectuer son dernier tour, un coup de génie consistant à sélectionner un client dans la salle, et à lui faire dessiner un objet de son choix sur une feuille de papier blanche, ordinaire. Salim remontait ensuite sur scène et plaçait la feuille dans une grande boîte noire, complètement vide, et placée en hauteur de telle façon qu'on ne pouvait le soupçonner d'avoir placé une trappe sous la scène. Après quelques formules magiques pour épater la galerie, le magicien faisait ouvrir la boîte et l'objet dessiné apparaissait réellement, à la place de la feuille de papier.
Le clou du tour était de demander au client de regarder dans ses poches, où il retrouvait le dessin qu'il venait d'effectuer. C'était un tour qui devenait extrêmement réputé, si bien que son manager, Olivier, recevait de nombreuses propositions pour partir à Las Vegas présenter ce show.
Olivier avait une table réservée dans le fond de la salle, suffisamment en retrait pour bénéficier d'une pénombre discrète. Il observait Salim, un verre devant lui, lorsqu'un client vint s'asseoir à côté de lui, de manière à ce que son visage ne soit visible que d'Olivier seul.
« Attendons qu'il ait terminé », proposa Olivier en faisant signe à la serveuse d'apporter de nouvelles consommations.
Les deux hommes n'échangèrent pas une parole jusqu'à l'arrivée de Salim, qui dut s'arrêter en traversant la salle, pour signer quelques autographes et prendre des photos avec des groupies.
« Vous êtes en avance, constata-t-il en s'asseyant.
_ Oui. Le temps presse. Etes-vous toujours intéressés ?
_ Bien sûr, intervint Olivier. Vous avez les photos sur vous ? »
L'homme hôcha la tête. Salim ne pouvait pas bien voir son visage, mais sa tête lui disait vaguement quelque chose, comme s'ils s'étaient connus il y a bien longtemps. Néanmoins, il était tout à fait incapable de retrouver le nom de cette personne, ni même l'endroit où ils s'étaient déjà rencontrés.
L'homme avala une gorgée de son café avant de prendre la parole :
« Vous devez bien comprendre le caractère hautement explosif de ces photos. Des personnages très puissants vont chercher à les récupérer, sauf si vous êtes suffisamment discrets.
_ Ne vous inquiétez pas pour ça, rétorqua Salim en faisant un petit geste de la main. On peut les voir ? »
L'homme sortit de la poche de son manteau une enveloppe marron, assez grande, fermée avec de la cire.
« Vous les verrez quand je serais parti. »
Cela fit rire Salim et agaça Olivier : « Il n'en est pas question. Vous pensez vraiment que je vais vous donner de l'argent sans savoir de quoi il retourne ?
_ Vous n'avez pas le choix.
_ Ah oui ? » ricana Salim en claquant des mains brusquement. Un nuage de fumée apparut soudain sur la table et l'enveloppe fut escamotée des mains de l'inconnu, pour se retrouver aux mains du magicien. « Voyons voir ce qu'il y a là-dedans. »
L'homme eut un rictus de haine pure, mais il devait admettre que Salim était plutôt très doué. Olivier et Salim jetèrent un coup d'oeil aux photographies contenues dans l'enveloppe ; l'homme ne leur avait pas menti, elles étaient explosives. Aussitôt, Olivier vit la possibilté de se faire un bon paquet d'argent en les monnayant habilement. Il sortit de sa poche une liasse de billets et la passa à l'inconnu.
« Je vous préviens à nouveau, messieurs, dit celui-ci en se levant. Ces photos vont vous attirer des ennuis si vous ne faites pas attention.
_ Vous, vous êtes encore en vie, non ? objecta Olivier.
_ Oui, mais je suis prudent. »
Il allait partir, mais se tourna vers Salim auparavant.
« Il n'y a pas à dire, vous êtes doué, l'ami.
_ Oui, je suis très doué, admit Salim modestement, mais pas autant que lui, ajouta-t-il en soupirant, désignant d'un geste la scène, où le Grand Nicolas S. effectuait son célèbre tour d'escamotage de stabylos.
Quand Olivier et Salim reportèrent leur attention sur l'inconnu, celui-ci avait disparu.


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